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La civilisation carthaginoise

Jamais l’Afrique du Nord ne semble s’être autant fait craindre en Méditerranée qu’à l’époque de l’apogée de la Carthage antique. Le fabuleux épisode d’Hannibal franchissant les Alpes pour se diriger contre Rome, et le fameux leitmotiv de Caton l’Ancien « Carthago delenda est » [1] en attestent dans la mémoire historienne collective. Les grandes lignes de l’histoire de la civilisation carthaginoise semblent donc passionnantes à rapporter.

La fondation de Carthage

Fondée vers 814 av. J.-C. par les Phéniciens, Carthage supplanta au fil des siècles suivants les autres colonies phéniciennes de Méditerranée occidentale en importance. Pour une époque si reculée, la date de fondation ne peut bien entendu que faire débat, bien qu’il faille préciser que l’autre date proposée par l’historiographie antique soit encore plus légendaire vu qu’elle était placée à l’époque de la Guerre de Troie (évènement lui-même légendaire !). Si les archéologues et historiens actuels privilègient l’hypothèse de la fondation de la cité vers 670 av. J.-C., ils ne font pour autant fi de l’idée qu’il ait existé avant cela un comptoir à l’emplacement de la cité. Chose qui pousserait presque à accepter la date de 814 comme celle de la fondation d’un comptoir, avant la naissance d’une cité un siècle et demi plus tard.
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Un navire phénicien
Cependant, c’est bel et bien le mythe de la princesse tyrienne Didon qui l’emporte. En effet, magnifié par l’Eneide de Virgile, le mythe voulait que la soeur du roi de Tyr Pigmalion (qui avait assassiné son mari Sychée) ait quitté les côtes phéniciennes pour préserver son peuple d’une guerre civile. Sa flotte aurait fini par accoster aux environs du golfe de Tunis, où elle aurait décidé d’y fonder Carthage. Pour l’histoire (ou la légende), elle aurait fini brûlée sur un bûcher, après avoir refusé d’épouser de force un tyran local (régnant sur des populations lybico-berbères), un certain Hiarbas...
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La mort de Didon. Illustration d’un manuscrit de l’Enéide (vers 400).

Les habitants de l’Afrique du Nord durant les premiers siècles de Carthage

L’apport ethnique phénicien ne peut bien entendu rivaliser avec le substrat autochtone. Il est d’ailleurs difficile de parler des habitants de l’Afrique du Nord de l’époque. Les sources antiques, aussi bien égyptiennes que grecques, parlent des mêmes populations. Des populations lybiennes. Au XIIe siècle av. J.-C., les Egyptiens parlaient déjà des Lebou (ou Libou), mais, ainsi que l’indique encore aujourd’hui le nom de la Lybie, il est fort probable qu’ils ne désignaient ainsi que les populations immédiatement à l’ouest de leur territoire. Si cet Ouest s’étendait sûrement jusqu’à Carthage, il est difficile de dire quelque chose sur le vaste territoire couvrant l’écrasante partie de l’actuel Maghreb. Mais, le plus célèbre spécialiste français des Berbères, Gabriel Camps, soutenait qu’il y avait une continuation historico-ethnique entre les populations lybiennes et les Berbères.

Carthage dans la Méditerranée pré-romaine

Il semble que la déliquescence de Tyr ait poussé Carthage à se mettre en avant pour assumer le rôle de meneuse de la diaspora phénicienne en Mediterranée. Alors qu’elle était déjà auparavant comme chargée d’assurer la défense des colonies puniques en Méditerranée occidentale. Se produit alors une véritable efflorescence politico-commerciale de la cité. En attestent les relations apparemment importantes qui la lièrent avec les Etrusques, lesquels étaient allés jusqu’à ériger un temple à Caeré (dans la région de Rome) en hommage à la déesse phénicienne Astarté. Des lamelles dorées (dites de Pyrgi) datant de 500 av. J.-C. portant la dédicace consacrée à ce temple par le roi étrusque Thefarié Velianas ont été retrouvées. Elles sont conservées au Museo Nazionale di Villa Giulia, à Rome.
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Des lamelles dorées datant de 500 av. J.-C. portant la dédicace consacrée à ce temple par le roi étrusque Thefarié Velianas.
Cela prouve donc que le prestige de Carthage en Méditerranée était donc plus que notable à l’époque. D’ailleurs certains spécialistes pensent même que Carthage avait imposé ce roi aux Etrusques contre leur volonté. Ce qui prouverait encore plus sa puissance et son autorité dans l’Italie de l’époque. D’ailleurs, quelques décennies plus tôt, vers 540-535, une alliance entre Carthaginois et Etrusques aurait affronté les Phocéens à Alalia (au large de la Corse, vers Bonifacio ?) et les auraient défait, les obligeant ainsi à abandonner leurs visées sur la Corse.
Cependant, ce ne sont pas les Phocéens qui causeront le plus de soucis à Carthage. Ce sont les Grecs qui verront d’un mauvais oeil l’essor de Carthage, vu qu’elle faisait dangereusement face à leurs colonies en Sicile. Ile qui fait alors l’objet de plus en plus de conflits entre les deux peuples.
En effet, un demi-siècle après la victoire des Carthaginois sur les Phocéens à Alalia, ils sont à leur tour vaincus par les troupes de Gélon, tyran de Syracuse. Ce dernier avait essayé d’unifier la Sicile en tentant de se rallier les principales cités grecques de l’île. Carthage intervient et la guerre est déclarée. Hamilcar de Giscon, commandant les troupes puniques, bien qu’apparemment soutenu par des renforts perses, est battu à la bataille d’Himère en 480 av. J.-C.
Il faut attendre quelques décennies pour voir Carthage se relever de cette défaite. Petit à petit, elle réussit à s’implanter encore plus solidement en Afrique. Sur mer, tout en évitant le domaine maritime de Syracuse, elle recommence à asseoir sa maitrise à travers notamment les expéditions lointaines d’Hannon et d’Himilcon. Le premier, à travers son fameux périple, aurait navigué le long de toute l’Afrique occidentale. Cependant, la Sicile revient dont l’orbite des visées carthaginoises et Hannibal de Giscon réussit à y prendre pied en 409 av. J.-C., à travers plusieurs victoires militaires qui restent tout de même éloignées du territoire du Syracuse. La volonté de s’établir en Sicile est donc des plus manifestes, mais la prudence reste de mise. En 405 av. J.-C., la seconde expédition est plus difficile, le chef de l’armée ayant succombé à une épidémie de peste lors du siège d’Agrigente. Himilcon, qui succède à Hannibal, finit par choisir de négocier avec Denys pour se mettre d’accord sur une sorte de cessation des hostilités, qui ressemble plus à une trêve qu’à une paix officielle. Dès 398 av. J.-C., Denys attaque en effet Motyé, attaque réussie mais Motyé est bientôt reprise. Un nouveau siège a lieu devant Syracuse et dure jusqu’en 396 av. J.-C., siège qui semble avoir été tenu pour durer, mais c’était sans compter sur la peste qui vint s’abattre sur les assiégeants et les pousser à rebrousser chemin. La guerre continue durant soixante ans entre les belligérants, soixante années de va-et-vient militaires, d’escarmouches et de batailles, de trêves et de reprises des hostilités. En 340 av. J.-C., l’armée carthaginoise ne peut toujours pas étendre son domaine d’influence plus loin que le sud de l’île.
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Possessions de Carthage en Afrique au temps de l’invasion d’Agathocle (tracé des frontières, parfois inconnu, restitué par L. I. Manfredi, La politica amministrativa di Cartagine in Africa, Rome, 2003).
En 315 av. J.-C., le statu quo est enfin bousculé par les Grecs. Agathocle de Syracuse s’empare de Messine et, en 311 av. J.-C., envahit les derniers comptoirs carthaginois de Sicile, ceux qui servaient presque de présence symbolique sur l’île. Cependant, les Carthaginois décident de réagir très fermement, et débarquent en Sicile de manière impressionnante. En 310 av. J.-C., les évènements se succédèrent si rapidement, et les moyens mis en place par les Carthaginois, menées par Hamilcar, furent si considérables qu’ils finirent par réussir à contrôler la quasi-totalité de la Sicile, mettant même le siège devant Syracuse. Agathocle, n’ayant rien à perdre ose ce que les Syracusains n’avaient jamais osé avant lui, mener la guerre contre Carthage sur son propre sol. Pris de cours, les Carthaginois sont obligés de rebrousser chemin pour défendre leurs possessions africaines. La débâcle est facilement imaginable. Agathocle parvient à semer le trouble dans l’esprit des Carthaginois sur leur propre sol, battant une armée de citoyens carthaginois menées par les deux généraux Hannon et Bomilcar. La victoire est éclatante, Hannon meurt dans la bataille. Agathocle se permet alors même le luxe de razzier les environs de Carthage, puis de montrer aux Carthaginois la tête d’Hamilcar tué lors d’une bataille.
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Monnaie de Syracuse frappée sous le règne d’Agathocle : sous Pégase est figuré le triskélès que l’on retrouve sur des monnaies d’Italie du Sud
Cependant, les chefs militaires sous le commandement d’Agathocle semblent alors se retourner contre lui après qu’il ait interdit plus de pillages et donc de butin. Ces dissenssions servent sûrement à expliquer comment Agathocle ne parvint pas à faire plier Carthage une fois des batailles remportées avec brio sur son propre territoire. Il finira par revenir en Sicile au lieu de marcher sur Carthage, pris de peur que les Carthaginois imitent sa stratègie et n’essaient d’attaquer Syracuse en son absence. Il laisse en Afrique on lieutenant Eumachos et ses deux fils Archagathos et Héraclide. Dans les années qui suivent, la situation se détériore en Afrique, les mercenaires demandant leur solde, et les Carthaginois gagnant du terrain. La légende raconte même qu’Agathocle ait soupçonné son fils Achagathos de se retourner contre lui avec l’aide de sa belle-mère... Agathocle repart définitivement en Sicile en 307, et l’année suivante un traité de paix est conclu avec les Carthaginois.

Les Guerres puniques

Toutefois, ce qui ancra à jamais Carthage dans l’imaginaire collectif, ce ne sont pas ses affrontements avec les Grecs, mais ceux désormais légendaires avec les Romains. En effet, le temps que passa Carthage à batailler avec les Grecs de Sicile semble avoir laissé le territoire de ses anciens alliés étrusques se construire lentement mais sûrement en une nation de plus en plus imposante. Lorsque Carthage finit par s’apercevoir de la montée de Rome, il était trop tard pour l’écraser de son ascendant aussi facilement que deux ou trois siècles plus tôt à l’époque étrusque. Dès la première guerre punique, un constat militaire est frappant. D’un côté les Romains bénéfiecient d’impressionantes forces terrestres mais d’une flotte des plus pauvres, et de l’autre les Carthaginois jouïssent d’une expérience navale séculaire mais souffrent d’une faible armée terrestre.
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Positions en -264.
Première guerre punique
La Première Guerre punique, qui couvre les années 264 à 241 av. J.-C., a pour théâtre la Sicile, disputée à nouveau aux Carthaginois ainsi que naguère par les Grecs.
D’un côté, les Carthaginois s’emparent de Messine, et de l’autre les Romains avaient déjà fait tomber sous leur joug quelques villes grecques toutes proches. Officiellement, le début de la guerre est marqué pa l’attaque par surprise de la garnison punique de Messine par Appius Claudius Caudex, lequel avait été envoyé suite aux pressions des propriétaires terriens de Campanie qui souffraient déjà de la chute de Messine entre les mains carthaginoise, vu que la ville servait à contrôler le trafic maritime entre l’île et l’Italie. Les Carthaginois se doivent alors de réagir. Des troupes sont envoyées à Agrigente, des préparatifs de guerre donc. Mais, ce n’est pas assez pour effrayer les Romains. Au contraire, c’est eux qui mènent l’attaque. Appius Claudius Caudex et Manius Valerius Maximus Corvinus Messalla prennent les villes de Ségeste et d’Agrigente après un siège de sept mois.
Les deux décennies suivantes marqueront un net recul militaire carthaginois, face aux victoires de plus en plus nombreuses des Romains mieux organisés face à une armée carthaginoise composée d’élements hétéroclites dont des mercenaires mal formés au combat. De plus, les Grecs de l’île affichent nettement leur préférence pour les Romains, les fournissant souvent en navires, en approvisionnement, voire en hommes. Bien que les Carthaginois, aient réussi à remporter quelques victoires navales, les riches propriétaires de Campanie sus-cités finançaient de leurs propres deniers la reconstitution de flottes romaines. Cette solidarité (quoique des conflits auraient eus lieu entre ces Campaniens et le Sénat au sujet du remboursement de leurs frais) permettent à Rome d’asseoir une réelle supériorité psychologique tout au long de la guerre. Une supériorité qui atteint son point d’orgue lors d’une bataille navale qui s’avèrera cruciale, marquant même la fin de la première guerre punique. Elle eut lieu au large de la principale citadelle carthaginoise en Sicile qu’est Lilybée. Cette victoire permet aux Romains de devenir les maîtres de la Méditerranée occidentale pour la première fois de leur histoire. Il semble que la stratègie navale de donner beaucoup d’importance à l’abordage ait été très bénéfique pour les Romains durant cette bataille. Hannibal Barca, qui commandait l’armée carthaginoise en Sicile, se rend à l’évidence (ne pouvant avoir ni approvisionnement ni renforts), et décide de proposer la paix aux Romains après en avoir informé Carthage qui ne pouvait lui proposer autre chose. Carthage, que constate alors que sa suprématie navale n’est plus que l’ombre de qu’elle fut. Tandis que Rome s’impose comme le nouvel empire méditerranéen.
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La puissance carthaginoise avant la Première Guerre punique
Deuxième guerre punique
Carthage fut bien entendu la grande perdante de la première guerre punique. En plus des indemnités de guerre qu’elle dut payer à Rome, les milliers de mercenaires qu’elle avait employés se révoltèrent contre elle et causèrent une véritable guerre civile. Ainsi, pendant que Hamilcar Barca s’ingéniait à faire taire cette révolte, les Romains en profitaient pour extirper facilement la Sardaigne aux Carthaginois. Mais, cela ne voulait pas pour autant dire que Carthage était à jamais à terre. Au contraire, la famille des Barcides reprend les rênes du pays, et dirige cette fois-ci l’impérialisme carthaginois vers l’Hispanie où la Nouvelle Carthage est fondée (Carthagène). Les affrontements avec les Ibères sont tout de même coûteux et Hamilcar lui-même meurt dans l’un d’entre eux.
Les Barcides semblent avoir nourri ce nouvel impérialisme carthaginois avec la ferme volonté de reprendre leur revanche sur les Romains. En effet, la Deuxième Guerre punique ne tarde pas à venir. Elle s’étend des années 218 à 201 av. J.-C., et reste célèbre pour l’image d’Epinal représentant Hannibal traversant les Alpes à la tête de ses troupes (accompagné de quelques mémorables éléphants) en direction de Rome. La guerre aurait été provoquée par le siège de Sagonte par les Carthaginois qui, selon le traité de 241 av. J.-C., devaient occuper les territoires au sud de l’Èbre, sorte de frontière entre les deux puissances méditerranéennes. Ayant peu-être tiré des leçons de la première guerre punique, et donc des alliances passées entre les Romains et les divers autochtones de Sicile, Hannibal approche d’abord fructueusement aussi bien des Gaulois que des Grecs avant de s’avancer militairement contre les Romains. Ainsi, nombre de Gaulois et de Grecs se mettent du côté des Carthaginois et battent les Romains dans plusieurs batailles. Dont celle très célèbre de Cannes. Toutefois, n’ayant pas suffisamment de moyens militaires, Hannibal renonce à marcher sur Rome. Il faut dire que les moyens militaires ne manquent pas dans le parti adverse. Car, bien que plusieurs cités se rallièrent à Hannibal et le rapprochement de ce dernier avec les Macédoniens, Rome réussit à présenter une armée gigantesque constituée de 200 000 hommes en armes. Chiffre plus qu’impressionnant à l’époque. Scipion (le futur « l’Africain ») est envoyé en Hispanie par le Sénat.
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Lieux des principales batailles de la Deuxième Guerre punique
Rome ne perd pas confiance, car les villes l’ayant abandonnée pour s’allier à Hannibal sont toutes éloignées et qu’aucune cité proche de Rome n’a fait défection. S’ensuit alors une stratègie payante. D’un côté Scipion, posté en Hispanie, combat tous les renforts qu’Hannibal attend, de l’autre Rome s’appuie sur ses cités environnantes pour marcher sur Hannibal très fermement. Le travail de Scipion est si bien fait que les derniers renforts destinés à Hannibal sont défait et l’Hispanie grosso modo contrôlée. Hannibal ne peut alors compter que sur ses troupes, et a du mal à avancer, est reste comme bloqué en Italie du Sud. Ainsi qu’Agathocle, bien avant, les Romains déplacent le champ de bataille en Afrique, parvenant à leur tour à s’allier une bonne partie des Numides, comme Hannibal s’était allié des Gaulois. La cavalerie numide perdue, il est difficile pour les Carthaginois de faire quelque chose. Ce sont ces victoires en Afrique qui donnent à Scipion son surnom « l’Africain ». Hannibal est alors défait près de Zama (probablement dans une vallée à l’ouest de l’actuelle Siliana), et Carthage renonce cette fois-ci de manière définitive à toute prétention militaire sur la Méditerranée occidentale.
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Gravure de la bataille de Zama par Cornelis Cort (1557)
Car, la perte de l’Hispanie réduit l’empire de Carthage à Carthage tout simplement. Cité alors amputée par la destruction de sa flotte, et écrasée par des indemnités de guerre. Hannibal a donc été vaincu, mais la population carthaginoise ne semble pas l’avoir rejeté pour autant. Il revient en effet au pouvoir en tant que suffète, s’attire la haine de l’élite politique en dénonçant sa corruption. Mais, ces belles paroles ne semblent pas avoir eues d’effets bénéfiques, ni rien changé à la situation politique de la cité.
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Double Shekel d’argent représentant Hannibal Barca
La Troisième Guerre punique
La situation de Carthage est effectivement misérable comparée à son lustre d’antan, mais cela n’est pas suffisant aux yeux des Romains. Ils semblent vouloir écraser à jamais l’orgueil de leur ancienne rivale et égale. Le célèbre mot de Caton l’Ancien (Delenda Carthago est), résume en effet cette vision des choses. Les années qui suivent confirment cette la légitimité d’une telle perspective, et donc la crainte d’un renouveau carthaginois. Car, si Carthage semble avoir, au moins dans les apparences renoncé à tout prestige militaire en Méditerranée, elle semble s’être concentrée sur son essor économique. Lors de la guerre qui oppose Rome aux Macédoniens, Carthage se permet même d’envoyer des tonnes de blé aux Romains. Chose qui ne doit pas avoir manqué de raviver la crainte romaine d’une rennaissance du pouvoir carthaginois. Un prétexte est alors trouvé pour concrétiser le fameux mot de Caton. Le traité de paix de 202 interdisait à Carthage de lever une armée, mais celle-ci fut obligée d’en lever une face à des incursions numides de plus en plus alarmantes. Le Sénat Romain décide alors d’envoyer une expédition punitive au but radical : détruire Carthage. Cette expédition arrive donc à Carthage et l’assiège pendant trois ans (de 149 à 146 av. J-C). c’est la Troisième guerre punique, la plus courte et la dernière, qui commence. Ce sont deux consuls qui mènent les troupes romaines : Manilius et Censorinus. Mais, la direction est ensuite confiée à Scipion Émilien qui achève le siège de Carthage, ce qui lui vaut le surnom « le second Africain ». Une fois la ville conquise, s’ensuit une guerre de rues apparemment similaire à une guerilla. La ville est progressivement détruite, jusqu’à ce que la citadelle située sur la colline de Byrsa soit prise. Carthage est alors achevée. Elle n’est plus. Des historiens latins rapportèrent qu’une fois la ville détruite les Romains auraient éparpiller du sel sur les terres pour les frapper d’infertilité, récit qui symbolise la crainte qu’avait nourrie Carthage dans l’imaginaire romain. Carthage fut en effet le seul pouvoir qui put défier Rome en Méditerranée occidentale. Carthage dont le sol fut déclaré sacer, c’est-à-dire maudit.
Chafik T. Benchekroun
Doctorant en histoire à l’université de Toulouse, rattaché à l’UMR 5136 du C.N.R.S.
legrandunivers.blogspot.com

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